Jour 9 : Portes du Longon – Saint-Dalmas
Dimanche 16 août :
27,2km, 1400m D+, 1700m D-, 8h20 d’étape, 6h40 de marche
La nuit a été glaciale, et je n’exagère pas, j’ai dormi avec avec mes chaussettes, ma laine mérinos et ma polaire, je me suis réveillé plusieurs fois en espérant qu’il soit plus tard pour que le Soleil vienne me réchauffer (ça c’est bien la première fois que ça m’arrive !). Vers 4/5h le thermomètre indique 4°C dans la tente.
Vers 6h30 je me motive pour sortir de mon duvet, quelle horreur. Hors de question de sortir de la tente, alors comme je n’ai pas envie de faire une croix sur le café je teste un truc que je n’ai jamais fait, et précautionneusement j’allume mon réchaud à l’intérieur pour faire chauffer l’eau, en plus ça réchauffe la tente ! Je petit-déjeune avec encore la moitié du corps dans le duvet, et ça me réchauffe de l’intérieur, c’est un régal. Je fais même ma vaisselle à l’intérieur – toujours pas la foi de sortir – avec un peu d’eau que je bois ensuite.
Quand je mets finalement le nez dehors je découvre que ma tente est givrée et qu’il en est de même pour tout le champs dans lequel je l’ai plantée. Vite soleil dépêche toi de venir me réchauffer ! Je m’éloigne de ma tente et marche vers cette frontière entre ombre et lumière qui n’est plus très loin afin de capter les premiers rayons chauds.
Je pars après avoir attendu 45min que ma tente dégivre, 5 minutes plus tard, j’arrive au refuge du Longon, je ne pensais pas être si proche ! (quand je vois 42€ sur la porte pour le tarif demi-pension je suis bien content d’avoir pu planter ma tente).
Je descend par un soleil radieux, un grand ciel bleu et une superbe vallée devant moi, où au contraire d’hier ça me fait plaisir de voir le ciel qui s’en démarque. J’ai rapidement trop chaud avec ma polaire et décide de me mettre torse nu, pour profiter pleinement du plaisir des rayons du soleil sur ma peau. Je descend en trottinant dans une sorte de sous-bois qui alterne ombre et soleil, comme ça je n’ai ni trop chaud ni trop froid.
Je passe à côté de quelques petits chalets éparses, tous plus mignons les uns que les autres, avec leur base en pierre et leur structure en bois, on dirait le chalet d’Heïdi. Je passe pas mal de temps à chanter, souvent « Atamawa » qui, j’ignore un peu pourquoi, me donne la pèche et me met d’encore plus bonne humeur.
Au sortir de la forêt, alors que je suis la route, un couple m’interpelle pour me dire que je suis en train de rater le chemin qui bifurque. Je m’approche d’eux et nous discutons un peu de tout et de rien mais surtout du cadre de vie incroyable qu’ils ont ici, ils possèdent même un des petits chalets que j’ai croisés plus haut, lui me dit qu’un de ses rêves serait d’y monter en hiver en raquettes pour y passer Noël dans le calme et le blanc au coin du feu, c’est vrai que ça fait rêver.
Je continue ma descente et finis par arriver à Roure, petit village dont je tombe vraiment sous le charme, sans doute le plus beau depuis le début de cette randonnée, la première chose que j’en vois est son « double » clocher en pierre qui se démarque sur le ciel bleu, c’est un village à flanc de montagne donc avec beaucoup de rues montantes ou descendantes, et un véritable mélange entre village provençal et village alpin. Au détour d’une rue je tombe sur un lavoir en pierre, parfait j’ai plein d’affaires à laver ! Et avec le temps qu’il fait elles vont bien sécher. Je m’installe donc au lavoir et y fait ma lessive avec mon petit savon de Marseille, il y a un petit quelque chose de magique dans cet instant, comme si j’étais plongé 100 ans en arrière.
Dans la descente vers St-Sauveur-sur-Tinée, la végétation et les pierres argileuses du chemin dont la couleur varie du bordeaux au violet me rappellent vraiment la Provence (et me donne hâte d’arriver à Sérignan).
J’arrive à Saint-Sauveur, environ 500m d’altitude, je suis bien descendu puisque parti de 1800, c’est pour l’instant le point le plus bas de cette rando. J’y fais une pause royale sur la place du village au soleil à côté de la fontaine, en dégustant une part de pissaladière achetée à la boulangerie.
Cette journée est jusqu’à présent un vrai délice, revigoré, je me remets en marche et attaque la montée vers Rimplas. Je croise deux allemands, en échangeant quelques mots j’ai compris qu’ils faisaient aussi le GR5, mais en entier, c’est-à-dire qu’ils sont partis des Pays-Bas, à Hoek von Holland sur la Mer du Nord, ils le font en plusieurs fois à raison de quinze jours par an !
J’arrive à Rimplas, où apparemment se tient un mariage en ce dimanche, je croise un petit groupe personnes âgées bien habillées et qui ont un peu du mal à marcher.
Saint-Dalmas, ma destination, est plus haute que Rimplas, pourtant la route qui part dans cette direction redescend, c’est toujours un peu frustrant. Je rythme ma descente avec les Brassens que je connais par cœur, cueille un petit paquet d’orties qui bordent le chemin en grand nombre depuis quelques temps, avec l’idée de m’en faire une soupe.
Le temps s’est rafraîchi et assombri, je commence à craindre que l’orage éclate. Je dépasse les villages de La Bollène et de La Roche, un vieux me dit que j’en ai pour 2h de rejoindre St-Dalmas, tant que ça ! Les jambes commencent à se faire sentir, en plus il se met à pleuvoir, allé un peu de chocolat pour se donner du courage. J’entre dans la forêt communale de Valdeblore où je croise de nombreuses pistes de VTT, je commence vraiment à avoir envie d’arriver, dire qu’au début de la journée je pensais me rallonger un peu l’étape après St-Dalmas pour gagner du temps sur celle de demain, mais là ni la météo ni ma force ne le permettent.. J’en mets du temps dans cette forêt, j’ai l’impression de faire un détour, en vérifiant ce soir sur la carte, c’est effectivement le cas, je me suis rallongé en suivant le GR52A pendant une bonne heure.
Saint-Dalmas enfin ! Les indications du vieux étaient malgré tout pessimistes. Je marche jusqu’au camping municipal alors que la pluie a bien forci, en y arrivant, plutôt que d’attendre que ça se calme, je me mets au défi de monter ma tente sous la pluie le plus rapidement possible. C’est un bel échec, la pluie s’intensifie juste à ce moment et le moment et le sol est tellement pierreux que je ne peux planter aucune sardine.. Une fois montée je me jette dedans pour enfin être au sec.
La pluie se calme assez rapidement (notons le premier mauvais timing de la rando), et c’est direction la douche bien chaude, dont je n’ai pas rêvée de la journée, mais deux heures de pluie non stop ça rafraîchit. Au camping je rencontre Éric, un gars super sympa qui doit avoir l’âge de Dad, cheveux longs et boucles d’oreilles, randonneur, sportif et amoureux de la nature, on s’entend très rapidement malgré la différence d’âge. Nous dînons ensemble et discutons à l’abri du toit devant l’accueil, je lui offre un Ricard, il m’offre un café. C’est quelqu’un qui ne gagne pas des milles et des cents mais qui vit heureux parce qu’il vit ses rêves, c’est génial, typiquement vers 17 ans alors qu’il n’avais pas envie de faire d’études il s’est lancé pendant 10 ans dans une vie de saisonnier, mono de ski, animateur de colo, initiateur de voile, etc. Avec sa 4L pour bouger de ville en ville où il trouvait du travail. Une vie avec peu de moyens mais tellement d’expérience !
Il est 22h50 quand je finis d’écrire, un horaire de coucher bien tard par rapport à ma moyenne de ces derniers jours !