Jour 11 : Lac du Trecolpas – Refuge des Merveilles

Jour 11 : Lac du Trecolpas – Refuge des Merveilles

Mardi 18 août :
19,5km, 1600m D+, 1750m D-, 10h étape, 7h45 marche

Le réveil dans le froid est difficile, mais je commence à en prendre l’habitude, je prends mon petit déjeuner chaud sous la tente, délice du matin.

Je plie la tente encore bien humide et, les mains gelées, commence à marcher à 7h45, je vois quelques autres tentes plantées autour du lac. Je marche vers la crête en face de moi qui est plein est, et qui va donc me cacher le soleil jusqu’à ce que je sois en haut. La montée attaque bien les jambes de bon matin, mais je finis par arriver en haut, j’aurais tout monté à l’ombre sans dépasser les 8°C, brrrr. En plus le soleil se cache timidement derrière les nuages. Je suis seul au Pas des Ladres (2448m), il est encore bien tôt, cette solitude me plait.
Dans la descente de l’autre côté mes jambes sont encore engourdies. Je vois de nombreux chamois, ils sont certainement plus du matin aussi. Le soleil viens de temps en temps pointer le bout de son nez, mes jambes se réchauffent, et mon rythme s’accélère. Je croise pas mal de groupes de gens qui montent depuis le refuge de Maldone de Fenestre.

J’arrive à La Maldone vers 9h30 et y remplis mon camel d’eau alors que pas mal de gens sont encore en train d’en partir. Mon objectif étant d’être au refuge de Nice le plus tôt possible pour voir si je pourrai faire tout le jour 12 dans l’aprèm. J’ai pas mal de montée pour atteindre le Pas du Mont Colomb (2552m), et aussi le premier « passage délicat » de la rando (c’est à dire en pointillé sur la carte). Je ne croise pas grand monde dans cette montée à part un père qui randonne avec ses deux fils d’une dizaine d’années qui sont tout fiers de me dire qu’ils vont faire trois jours de rando. Je vois aussi mes premiers névés et en traverse un, gare à ne pas glisser !

Je passe le pas, à peine 2m de largeur entre deux hautes pierres, et c’est le début de la descente qu’on peut effectivement qualifier de délicat, ça descend à pic et je garde les bâtons dans le dos pour avoir les mains libres. Une fois passé le passage escarpé je reprends mes bâtons, et repars en trottinant. Je suis plutôt à l’aise et me sens l’âme d’un chamois en sautillant de pierre en pierre et en dépassant les randonneurs qui descendent. Mes pieds râlent un peu, c’est vrai que je les maltraite, surtout avec ces chaussures qui commencent à rendre l’âme.
Me voilà arrivé au Lac de la Fous, il est beau, il est grand, il donne envie de se baigner. J’en fais le tour, j’ai le refuge en vue, mais un peu avant d’y arriver je trouve un petit coin parfait pour déjeuner, sur une petite plage d’herbe au bord de l’eau, je me baigne dans la petite cuvette d’eau turquoise qui borde ma plage. Encore une fois c’est l’affaire d’à peine une minute mais ça fait un bien fou. Après avoir déjeuné, je m’allonge au soleil, tête contre mon sac, en grignotant des raisins secs dont il me restait un paquet. Là, maintenant, tout de suite, je suis extrêmement bien.

Après cette pause bien reposante, je passe le refuge de Nice et repars pour les 500m de positif jusqu’à la baisse de Basto, et le deuxième et dernier passage délicat. Le début du chemin est tranquille, sentier de terre qui monte tout doucement entre des prairies où je vois brouter quelques beaux chevaux à la robe très sombre. À un moment je quitte le sentier pour un pierrier et c’est le début de mon calvaire, cette montée me fait vraiment souffrir. Déjà depuis quelques minutes j’étais dans une sorte de cirque entouré de hautes, très hautes crêtes, sans savoir par laquelle j’allais bien être obligé de passer. Au bout d’à peine un quart d’heure déjà mes jambes n’en peuvent plus, et le col a l’air encore bien loin, j’essaye de me dire qu’il faut ne pas réfléchir, juste mettre un pied devant l’autre, suivre les marques de GR et mettre un pied devant l’autre… On va bien finir par y arriver, cette fois j’ai gardé mes bâtons qui permettent de plus économiser les jambes, je dois à plusieurs reprises mettre les deux dans une seule main pour pouvoir utiliser l’autre et me hisser. Allez les jambes, il faut continuer à me porter ! C’est dur, je n’avance pas vite. Mais le bout se rapproche, et à un moment, victoire ! Baisse de Basto (2693m). Quarante minutes seulement ? ça m’a paru tellement plus long.

En poussant mon petit cri de victoire je m’aperçois qu’il y a une famille juste derrière moi, un père et ses deux enfants, une fille de 10 ans et un garçon de 6, ils ont monté ça eux aussi ? Ouah je leur tire mon chapeau. D’ailleurs je ne manque pas de leur dire, on discute assez longtemps, ils sont très sympas, la fille est plus bavarde que son père et sacrément mature pour son âge, à m’interroger sur ce que j’ai dans mon sac, sur ma randonnée et tout, je suis impressionné.

Dans la descente au bout de quelques minutes nous apercevons des bouquetins, génial, l’un d’eux est à quelques mètres de moi seulement. Après quelques dizaines de minutes je me retrouve en vue de l’immense lac du Basto, un peu en aval. En gros là j’ai le lac du Basto à ma gauche, la baisse du Basto derrière moi et la tête nord du Basto à ma droite !
Me voilà maintenant en bas de ma probable dernière montée de la journée, la baisse de Valmasque (2541m), il n’y a que 200m de positif à faire et ça monte tranquillement en lacets, mes jambes tirent un peu mais en 20min je suis en haut.

Le passage de cette baisse marque l’entrée dans la Vallée des Merveilles et sa zone réglementée. C’est tout pierreux et sans grand intérêt vue d’ici, mais bon attendons d’y être pour juger, après tout la vallée porte ce nom pour les découvertes archéologiques qui y ont été faites (moi je me voyais dans le petit dinosaure avec ce nom), j’espère que je vais voir des gravures rupestres !

En haut du col un groupe de trois jeunes m’ont demandé de les prendre en photo avec leur téléphone, ça m’a fait trop bizarre de tenir un smartphone dans la main.

Je descend dans la vallée, au début c’est le néant, à part quelques panneaux « monuments historiques – accès interdit », je désespère un peu. Puis une fois passé le lac des Merveilles, je vois un panneau : « Stèle du chef de tribu – 10m », cool ! Bon la stèle n’est pas si impressionnante que ça, on ne voit pas très bien les gravures, n’empêche que c’est fou de se dire que ça a été gravé par la main de l’homme il y a plusieurs milliers d’années. Un peu plus loin j’en vois une deuxième, « le Christ » sur un rocher. Je continue à descendre et tombe sur un groupe de gens accompagnés d’un guide, j’en profite pour écouter ses explications devant ce mur qui a été saccagé par plein de marques de gens qui ont mis leur nom, et qui cachent les gravures, c’est insensé cet irrespect… Un peu plus haut, toujours avec le groupe, on voit une pierre recouverte de gravures, c’est impressionnant, beaucoup représentent des poignards ou des têtes d’animaux à cornes, certaines sont justes figuratives, autrement dit on n’a aucune idée de ce qu’elles représentent. Le guide me précise que ces gravures du néolithique datent d’entre -1500 et -3500, en fait c’est incroyable, je peux comprendre la passion qui anime les archéologues.

J’arrive à l’aire de bivouac au dessus du refuge des Merveilles un peu avant 18h, je plante ma tente, m’étire et vais faire le plein d’eau au refuge (malheureusement je ne pourrai pas y jeter ma poubelle qui commence à être bien grosse depuis St-Dalmas).
Ce soir je termine mon saucisson, ma tome de l’Ubaye, et ma bombonne de gaz ! Je verrai demain si je mange froid ou si je me sers du P3RS.

La fatigue me gagne pendant que j’écris, tout de même j’ai passé 4 cols aujourd’hui ! C’était une belle étape mais malgré tout, comme m’avait prévenu un homme il y a quelques jours, je n’ai pas vu un arbre de la journée. En même temps j’ai passé quasi toute la journée au dessus de 2000m.

 

Le Lac du Trecolpas au petit matin
Comment s’appelle cette jolie fleur ? Une anémone des Alpes ?
La montée vers le Pas du Mont Colomb
Le refuge de Nice, au dessus du Lac de la Fous
Et ma petite plage privée
Le moment faune : des mérens ?
Un pauvre chamois à une seule corne
Et un majestueux bouquetin qui se gratte
Le grand Lac du Basto
J’entre dans la Vallée des Merveilles
Et ses gravures rupestres

 

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